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Les besoins et supplementation systématique chez les femmes enceintes

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Les besoins et supplementation systématique chez les femmes enceintes Empty Les besoins et supplementation systématique chez les femmes enceintes

Message  SFM Samirays Lun 23 Mai - 19:09

Supplémentation systématique
Fer
Calcium et vitamine D
Fluor
Iode
Vitamines - Acide folique
Situations particulières
Syndromes malformatifs
Les anémies gravidiques
Petits maux de la grossesse
La toxémie gravidique
Hémorragies néo-natales

En Résumé


Au cours de la grossesse, les prescriptions systématiques sont actuellement très fréquentes : fer, fluor, polyvitamines, veinotoniques, pommade anti-vergetures de telle sorte que ces prescriptions deviennent soit automatiques, soit induites par une demande des femmes.
Mais quelles supplémentations sont elles réellement nécessaires ?
I. Supplémentation systématique
Préambule :
Les besoins au cours de la grossesse sont estimés d'après les quantités de nutriments (graisses, protéines, calcium, fer, etc.) déposées dans l'organisme fœtal, le placenta et l'organisme maternel, auxquelles s'ajoutent, pour l'énergie, les coûts de maintenance de l'unité foeto-placentaire et de l'organisme maternel.
Ces données sont généralement majorées pour tenir compte de la biodisponibilité et des variations inter-individuelles, puis exprimées sous la forme de recommandations quotidiennes, soit uniformément réparties sur la durée de la grossesse, soit adaptées à chaque trimestre en fonction de la vitesse de croissance fœtale.
Les valeurs obtenues représentent donc, pour chacun des nutriments considérés, la quantité qu'il faudrait théoriquement fournir en plus de l'alimentation habituelle pour couvrir l'ensemble des besoins de la grossesse.
Toutefois, ces résultats ne tiennent aucun compte de l'efficacité avec laquelle le placenta tire parti des réserves maternelles, ni du rôle tampon que celles-ci peuvent jouer entre les besoins du fœtus et les fluctuations des ressources alimentaires. Pourtant, le contrôle précis des transferts materno-foeaux constitue une puissante barrière de sécurité. Ainsi, le "statut" en fer, en calcium ou en vitamine A des nouveau-nés reste, dans de larges limites, indépendant de celui de leur mère.
Ce mode de calcul néglige aussi les capacités d'adaptation de l'organisme maternel, alors que le métabolisme de certains nutriments est profondément affecté par la grossesse. Par exemple, les bilans nets de l'azote et du calcium deviennent positifs dès le deuxième trimestre de la gestation. De la même façon, l'absorption intestinale du fer augmente pour atteindre au cours des derniers mois des valeurs 5 à 9 fois plus élevées qu'en début de grossesse. La plupart de ces modifications sont acquises au cours du deuxième trimestre, voire dès le premier, c'est-à-dire à un moment où les besoins du fœtus sont encore très modestes ou négligeables. Une part importante des besoins serait donc couverte grâce à un "ajustement anticipé" du métabolisme maternel, permettant la constitution de réserves mobilisables au cours du dernier trimestre, lorsque la croissance fœtale est la plus rapide.
Les apports quotidiens recommandés actuels apparaissent bien éloignés des réalités physiologiques et, par conséquent, surévaluent les besoins réels. Tout indique aujourd'hui que les mécanismes d'adaptation permettent à des femmes bien nourries, en bonne santé, ayant à leur disposition une alimentation variée, de mener une grossesse normale à son terme sans autres ressources que celles que procure l'augmentation spontanée de leur consommation alimentaire.
Fer
Estimation des besoins :
Le contenu en fer d'un fœtus de 20 semaines n'est que de 30 mg, mais il atteint environ 270 mg chez le nouveau-né à terme et en bonne santé. Ceci ne constitue, toutefois, qu'une faible fraction des besoins de la grossesse, le total étant de l'ordre de 850 mg. Dans l'alimentation de type occidental, la viande, le poisson, les céréales et les fruits en représentent les principales sources. Si le fer d'origine animale est relativement bien absorbé (30 à 40 %), l'absorption du fer d'origine végétale ne dépasse pas 5 %. Son coefficient moyen d'absorption pour un régime varié est donc de 10 à 15 %. Compte tenu des apports alimentaires moyens, qui ne représentent que 10 à 15 mg/j en France, on pourrait considérer que l'ensemble des femmes enceintes est exposé au risque de carence en fer. Ce serait méconnaître l'importante augmentation des capacités de l'absorption intestinale du fer qui se manifeste au cours de la grossesse. Elle concerne aussi bien le fer d'origine animale que le fer minéral. Elle n'est pas la conséquence d'une anémie, mais constitue une réponse physiologique à la diminution concomitante des réserves maternelles. Cette adaptation devrait permettre de faire face aux besoins supplémentaires, notamment en deuxième partie de grossesse où ils atteignent 3 à 6 mg/j, selon l'état des réserves préexistantes. Ainsi, la couverture des besoins serait acquise à des niveaux d'apports tout à fait comparables à ceux observés dans la population générale française, à la seule condition que la ration alimentaire soit suffisante (> 2 000 Kcal) et variée, sans exclusion des aliments d'origine animale.
Conséquences d'une carence :
Les risques d'accouchement prématuré et de naissance d'enfants de faible poids sont respectivement 2,5 et 3 fois plus élevés chez les femmes présentant une anémie liée à une carence en fer que chez celles ayant une anémie d'une autre cause, suggérant que c'est bien la carence en fer et non l'anémie qui en est responsable. L'existence de saignements augmente aussi les risques d'accouchement prématuré et la conjonction des deux facteurs est additive, le risque étant alors multiplié par 5, mais l'anémie découverte après 28 semaines, c'est-à-dire correspondant à une carence gravidique, apparaît dépourvue de conséquences néfastes. De plus, l'anémie du post-partum n'est pas liée au statut martial au cours du troisième trimestre. Enfin, la prescription systématique de fer pendant la grossesse ne réduit pas l'utilisation des transfusions.
Enfin, les conséquences d'une carence de la mère sur le statut en fer du nouveau-né sont minimes, si elles existent. En effet, aucun argument n'indique que les nouveau-nés de mères carencées soient exposés au même risque. Au contraire, les réserves néonatales semblent tout à fait comparables, que les mères aient été carencées, en équilibre, voire même supplémentées en fer. Il n'a d'ailleurs jamais pu être démontré que la supplémentation en fer améliore en quoi que ce soit la santé du foetus et du nouveau-né, en dépit de la correction des index hématologiques maternels.
En conclusion, il n'y a aucune justification à la supplémentation systématique en fer des femmes enceintes.
Calcium et vitamine D
Estimation des besoins :
Avant la naissance à terme, le fœtus accumule près de 30 g de calcium et 15 g de phosphore. L'accrétion calcique se fait essentiellement en fin de grossesse (20 g de calcium et 10 g de phosphore) et on estime qu'elle est de l'ordre de 200 mg/j au cours du troisième trimestre. Les recommandations concernant l'apport calcique au cours de la grossesse varient d'un pays à l'autre et se situent entre 750 et 1 200 mg/j de calcium élément. En France, la consommation moyenne des femmes enceintes est de l'ordre de 700 à 1 100 mg/j. L'absorption intestinale du calcium augmente dès le début de la grossesse. En conséquence, le bilan calcique est positif tout au long de la gestation (150 à 200 mg/j). L'adaptation de l'absorption intestinale, avec la mobilisation du calcium osseux maternel, suffit à couvrir les besoins.
En conclusion, il est donc inutile de recommander aux femmes enceintes d'augmenter leurs apports alimentaires en calcium, surtout si leur consommation de lait et de produits laitiers est quotidienne.
La vitamine D et surtout la 25OH-D sont l'objet d'un transfert transplacentaire actif. À l'inverse du calcium et du phosphore, les concentrations de 25OH-D sont plus élevées chez la mère que chez le fœtus, surtout lorsque les taux maternels sont normaux ou élevés. Les concentrations du fœtus se rapprochent de celles de sa mère lorsque les taux maternels de 25OH-D s'abaissent. En revanche, il n'y a pas de corrélation entre les concentrations de la 25OH-D du sang maternel et celles du cordon, le composé trihydroxylé ne franchissant pas, ou mal, la barrière placentaire. La régulation de sa synthèse est donc propre à l'unité foeto-placentaire. Les femmes enceintes présentent donc un déficit en vitamine D en fin de grossesse, surtout quand celle-ci se situe en hiver ou au début du printemps, même dans des villes aussi ensoleillées que Marseille ou Nice.
Conséquences des carences :
Il existe d'ailleurs une relation entre un mauvais statut en vitamine D et la fréquence des accidents d'hypocalcémie néonatale tardive, et même précoce.
De plus, les femmes les plus carencées peuvent développer, durant la grossesse, une ostéomalacie symptomatique, dont on ignore encore le rôle dans l'apparition d'une ostéoporose post-ménopausique.
Effets d'une supplémentation :
La supplémentation en vitamines D a permis de réduire la fréquence des hypocalcémies néonatales de 5,1 à 1,9 %, la différence étant encore plus marquée au cours de l'hiver où la fréquence chute de 7,7 à 2,4 %.
En conclusion, il est donc indispensable d'assurer aux femmes enceintes le meilleur statut vitaminique D possible, particulièrement au cours du troisième trimestre et pendant les mois en " r ". Même si l'ensoleillement joue un rôle essentiel, les conditions éminemment variables de vie, de climat, de latitude et de pollution atmosphérique interdisent de compter sur la seule exposition aux UV solaires. Les apports recommandés ont été fixés à 10 mg/j (400 UI/j). Toutefois, cette dose n'est pas suffisante si la supplémentation n'est pas entreprise dès le début de la grossesse. Lorsqu'elle n'est faite qu'au troisième trimestre, 1 000 UI/j sont alors nécessaires. Les mêmes résultats peuvent être obtenus par une dose unique de 100 000 UI administrée au début du sixième ou septième mois, mais il faut exclure les doses de charge plus élevées, en raison de leur toxicité potentielle.
Fluor
Estimation des besoins :
La responsabilité du fluor dans les dystrophies de l'émail dentaire observées dans certaines communautés et son rôle dans la prévention de la carie dentaire sont reconnus depuis près d'un demi-siècle.
Conséquences d'une carence :
La carie est encore, aux yeux de l'OMS, le 3e fléau mondial et touche la plupart des adultes de ce pays. Sa fréquence, tant au niveau des dents de lait que des dents permanentes, a sensiblement diminué au cours des dix dernières années en France, une évolution qui est liée à l'utilisation accrue de fluor sous ses diverses formes. Aisément absorbé par l'intestin, le fluor passe le placenta, mais est dépourvu d'effet tératogène. Au niveau des dents, l'incorporation du fluor se fait pendant le processus de calcification, puis par échange ionique avec le milieu buccal, dès l'éruption dentaire. La minéralisation de la couronne des dents temporaires débute vers le 4e mois de gestation, alors que celle des dents permanentes ne commence que vers la naissance et se poursuit jusque vers l'âge de 12-13 ans.
Effet d'une supplémentation :
L'administration de fluor à la femme enceinte ne pourrait avoir d'effet que sur les dents de lait. Toutefois, l'incorporation de fluorures lors de la minéralisation n'est pas stable, en raison des échanges qui s'instaurent au niveau de l'émail dès l'éruption des dents .
En conclusion, l'efficacité de la prévention des caries par l'administration systématique de fluor dès la naissance et jusqu'à 12 ans au minimum, est parfaitement étayée et donc recommandée mais il n'existe actuellement aucune preuve que l'administration de fluor à la mère dès le 3e mois de la grossesse comporte un bénéfice supplémentaire pour les dents de son enfant.
Iode
Estimation des besoins :
Au cours de la grossesse et de la lactation, les besoins en iode sont augmentés de 50 microg/jour, les besoins journaliers se situant entre 150 et 200 microg/jour.
Conséquences d'une carence :
La manifestation clinique de la déficience d'apport est la présence d'une hyperplasie thyroïdienne plus ou moins importante pouvant se traduire par l'apparition d'un goitre. L'ETA (European Thyroid Association) a classé en 1985 la France dans les pays où "existe au niveau régional ou national un problème de goitre endémique". La grossesse et la lactation contribuent donc à l'apparition ou à l'aggravation des situations de déficiences faibles à modérées. Les états de carence sévère restent néanmoins exceptionnels.
Effet d'une supplémentation :
Dans ces états de déficience légère à modérée, une augmentation des apports en iode dès le début de grossesse prévient ou atténue fortement les anomalies morphologiques et fonctionnelles chez la mère et chez le nouveau-né.
En conclusion, une correction de cette déficience doit résulter en premier lieu d'un conseil nutritionnel privilégiant les sources essentielles en iode (lait, poisson, oeufs, utilisation d'un sel enrichi en iode).
Vitamines - Acide folique (vitamine B9)
Estimation des besoins :
En France, la consommation moyenne des femmes enceintes est de l'ordre de 300 microg/j, pour des apports quotidiens recommandés généralement estimés à 400 microg/j.
Conséquences d'une carence en Vitamine B9 :
Les anémies mégaloblastiques peuvent toucher jusqu'à 25 % des femmes enceintes non supplémentées en folates dans les pays en développement et 2,5 à 5 % dans les pays industrialisés. Mais les carences infra-cliniques sont beaucoup plus fréquentes, pouvant toucher 25 % des femmes dans les pays développés et jusqu'à 50 % dans les pays en développement.
Une baisse des folates contenus dans le sérum sanguin et les globules rouges se produit presque constamment au cours de la grossesse chez les femmes non supplémentées. Elle est en partie due à l'hémodilution, mais elle traduit aussi des modifications métaboliques liées à la grossesse. Le catabolisme de l'acide folique est considérablement accru, suggérant que la carence ne s'explique pas seulement par les transferts à l'unité foeto-placentaire, dont la teneur ne dépasse pas 800 mg à terme. Le degré de la carence dépend à l'évidence de l'importance des réserves en début de grossesse. Dans les sociétés occidentales, un tiers des femmes au moins ont des taux de folates érythrocytaires abaissés dès le début de leur grossesse.
Cependant, tout conseil diététique à ce sujet serait illusoire, dans la mesure où l'on ne peut attendre d'amélioration à court terme du statut vitaminique de la seule augmentation des folates alimentaires. La baisse de la concentration de folates peut, par contre, être évitée par une supplémentation de 100 microg/j d'acide folique. Chez des femmes commençant leur grossesse avec des réserves en folates un peu insuffisantes, le déficit en folates pourrait donc être prévenu par des apports équivalents à 200 microg/j d'acide folique.
Les conséquences de la carence en folates sur l'issue de la grossesse sont discutées. En effet, il est difficile d'isoler ses effets propres de ceux des autres carences nutritionnelles qui lui sont fréquemment associées dans les milieux défavorisés. La carence en acide folique pourrait expliquer un certain nombre de naissances prématurées. Le statut en folates est moins bon chez les femmes ayant donné naissance à des enfants de faible poids de naissance et la prescription de 350 microg/j d'acide folique à partir du 6e mois, allonge d'une semaine la durée de la grossesse et augmente proportionnellement le poids de naissance. L'incidence de la prématurité a d'ailleurs été trouvée réduite après supplémentation en acide folique (5 mg/j) chez les femmes dont l'alimentation est pauvre en folates.
Les conséquences de la carence en folates sur le développement fœtal sont beaucoup mieux établies. Un retard de croissance intra-utérin et différentes malformations peuvent être induits expérimentalement par l'administration d'antifoliques, notamment des fentes labiales et labio-palatines, des anomalies des extrémités et des malformations du tube neural (encéphalocèle, anencéphalie et spina bifida).
Effet d'une supplémentation :
La prescription de folates en période périconceptionnelle permet de réduire le risque de récurrence des défauts de fermeture du tube neural . En conséquence, on pense que l'effet protecteur de l'acide folique peut être extrapolé à la population générale et qu'une supplémentation en acide folique doit prévenir la survenue de ces malformations chez les femmes qui n'ont pas eu d'antécédents de ce type. On suppose par là même que les mécanismes biologiques de la survenue d'une anomalie du tube neural sont similaires ou identiques à ceux de la récurrence.
Une seule étude randomisée (Czeizel) a mis en évidence une diminution globale des malformations de 1,6 % à 0,9 % avec une préparation polyvitaminée comportant 800 microg d'acide folique. Outre les anomalies du tube neural, cette prévention diminue également de façon significative les anomalies urinaires et cardiaques. Cependant, cette étude nécessite quelques réserves :
- il est difficile de savoir si l'effet préventif est lié au complexe polyvitaminé ou à l'acide folique ;
- l'extrapolation à la population française est difficile car la fréquence des anomalies du tube neural est trois fois plus faible et le niveau d'apport moyen en folates est deux fois plus élevé qu'en Hongrie.
En conclusion, il est recommandé d'augmenter les apports en folates en période périconceptionnelle par une alimentation plus riche en légumes verts et, à défaut, par une supplémentation de 100 à 200 microg par jour pendant cette période.

II. Situations particulières
A. Syndromes malformatifs
Récurrence des défauts de fermeture du tube neural :
L'analyse des prélèvements sanguins du 1er trimestre, chez des femmes portant un enfant atteint de défaut de fermeture du tube neural, met en évidence une chute significative des folates du sérum et des folates des globules rouges.
La supplémentation péri-conceptionnelle en folates ne réduit que des deux tiers le risque de récidive d'un défaut de fermeture du tube neural, justifiant ainsi un dépistage de ces anomalies en début de grossesse. Il n'y a aucune preuve que les autres vitamines contenues dans les préparations polyvitaminées participent à cette prévention, bien que l'on connaisse les interférences métaboliques entre la vitamine B9 et les vitamines B12, B6 et C d'une part et entre la vitamine B9 et le zinc d'autre part. La posologie quotidienne de la supplémentation périconceptionnelle en vitamine B9 habituellement conseillée est, dans cette situation particulière, de 4 à 5 mg mais on peut remarquer que des résultats identiques ont été obtenus avec des doses 10 fois moindres (0,360 mg).
Récurrences des fentes labio-palatines (bec de lièvre):
Certaines populations à risque d'avoir un enfant atteint de fente labio-palatine, soit parce que l'un des parents est atteint, soit parce que la femme a déjà eu un enfant atteint, semblent pouvoir bénéficier d'un traitement comportant un supplément en acide folique de 10 mg/jour et polyvitamines commencés 2 mois avant le début de grossesse et poursuivi au moins 3 mois après. Par contre, la supplémentation s'avère inefficace si le cas index est un sujet de sexe féminin atteint d'une fente bilatérale.
B. Les anémies gravidiques
L'anémie gravidique se définit par un taux d'hémoglobine inférieur à 11,0 g/dl au premier et au troisième trimestres de la grossesse et inférieur à 10,5 g/dl au deuxième trimestre.
a. Les anémies ferriprives :
Le diagnostic de la carence martiale (en fer) repose sur une ferritine plasmatique inférieure à 12 microg/l et de manière encore plus spécifique sur une augmentation des récepteurs de la transferrine (supérieure à 8,5 mg/l).
Cette carence martiale, d'expression précoce, entraîne un risque accru d'accouchement prématuré (et de faible poids à la naissance).
Il faudrait donc déplacer la mesure de l'hémogramme du 6e mois à la 1ère consultation de la grossesse afin d'avoir un effet sur le risque d'accouchement prématuré et envisager un traitement lorsque le taux d'hémoglobine est inférieur à 11 g/dl ou l'hématocrite inférieur à 32 %. Le traitement consiste, après avoir vérifié que la consommation de viande ou de poisson est quotidienne, en l'administration de 30 à 60 mg de fer par jour jusqu'à la correction de l'anémie (appréciée sur l'hémogramme pratiqué six semaines plus tard). La prise du fer doit être décalée par rapport à l'absorption des préparations polyvitaminées et minéralisées pour ne pas interférer avec l'absorption du calcium, du magnésium et du zinc. La supplémentation martiale augmente le taux d'hémoglobine de 1,0 à 1,7 g/dl. Il faut éviter une sur-correction à cause des risques de troubles de la croissance foetale lorsque l'hématocrite dépasse 39 %.
b. Les anémies par carence en folates (vitamine B9) :
Ces anémies s'observent préférentiellement dans des situations qui cumulent les facteurs de risque suivants : gestantes fumeuses, alcooliques, ayant utilisé une contraception orale ou présentant des carences alimentaires manifestes. Elles seraient plus fréquentes également au cours des grossesses multiples et lors des gestations chez les adolescentes, où il existe une compétition entre la croissance fœtale et la croissance maternelle pas encore achevée.
Cette carence peut être responsable d'une hypotrophie fœtale.
Il est donc justifié de prescrire un traitement comportant 1 mg de folates par jour jusqu'à la correction de l'anémie (appréciée sur l'hémogramme pratiqué six semaines plus tard).
C. Petits maux de la grossesse
Crampes musculaires :
Des crampes musculaires au niveau des jambes sont rapportées, en particulier la nuit et au cours des derniers mois de la grossesse par 5 à 30 % des femmes enceintes. Le rôle du calcium et celui du magnésium, deux minéraux à la fois synergiques et antagonistes, ont été incriminés dans ces troubles musculaires. Il n'existe pas de différence de la calcémie entre patientes symptomatiques et témoins, de plus, un traitement par calcium n'améliore pas significativement les troubles. Au contraire, les patientes souffrant de crampes ont des magnésémies abaissées. La supplémentation en magnésium n'augmente cependant pas la magnésémie, car le magnésium en excès est excrété par voie urinaire.
La supplémentation par 5 mmol per os de magnésium pendant 3 mois montre une diminution significative des crampes mais les séries sont souvent de petites tailles.
Nausées, vomissements :
La vitamine B6 et une association polyvitaminée réduisent la fréquence des nausées et des vertiges à des degrés variables suivant les séries.
D. La toxémie gravidique
L'idée d'une supplémentation en calcium pour prévenir l'apparition d'une toxémie gravidique vient de l'observation des Indiens Maya du Guatemala qui, traditionnellement, trempent leurs grains de blé dans la chaux avant la cuisson. Grâce à cette forte consommation de calcium, l'incidence de la pré-éclampsie et de l'éclampsie est faible. Le mode d'action d'une surcharge alimentaire en calcium semble se situer au niveau de la cellule musculaire, car l'augmentation de la calcémie inhibe la libération de parathormone et abaisse le calcium intracellulaire, avec réduction de la réactivité de la couche musculaire de la paroi artérielle.
Les premières études cliniques en Amérique du Sud ont mis en évidence une réduction de la fréquence des hypertensions gravidiques, des pré-éclampsies, du taux de prématurité, mais il n'y avait aucune influence sur les retards de croissance intra-utérins, sur le taux de césariennes ni sur la mortalité.
Malheureusement, une large étude américaine a infirmé ces résultats, pouvant faire suspecter que la population sud-américaine était carencée en calcium.
Dans ces conditions, il ne semble pas actuellement souhaitable de réaliser de supplémentation en calcium pour prévenir la survenue d'une HTA gravidique, mais des essais cliniques comparatifs entre calcium et aspirine pourraient être entrepris.
E. Les hémorragies néo-natales
Les hémorragies péri-ventriculaires et intra-ventriculaires frappent 35 à 45 % des nouveau-nés de moins de 1 500 grammes. 65 % des morts néo-natales des prématurés sont associées à une hémorragie intraventriculaire et 20 % des survivants sont atteints d'infirmité sensorielle et motrice modérée ou sévère. Ces hémorragies surviennent dans le réseau capillaire de la matrice germinale sous-épendymaire et seraient favorisées par une diminution de l'activité coagulante du sang du prématuré en particulier une baisse de l'agrégation plaquettaire et une perturbation des temps de prothrombine et de thromboplastine partielle.
Les essais cliniques de prévention des hémorragies cérébrales du prématuré de moins de 32 à 34 semaines d'aménorrhée par 10 mg par voie intramusculaire, au minimum 4 heures avant la naissance, ou par 20 mg per os de vitamine K1 par jour jusqu'à la naissance, ne montrent pas d'effet favorable sur le nombre total d'hémorragies ; par contre le traitement semble actif sur la prévention des hémorragies sévères, de grade III et IV.
Cette prévention pourrait donc être pratiquée en cas de prématurité inférieure à 34 SA en complément de la corticothérapie.
De plus, il existe des interférences médicamenteuses entre la vitamine K et des traitements susceptibles d'en modifier l'absorption ou l'efficacité : traitement tuberculostatique, cholestyramine, salicylés à fortes doses et, en particulier, les traitements anticonvulsivants (carbamazépine, phénytoïne, phénobarbital). La prévention anténatale par 10 mg de vitamine K1 per os à partir de 36 semaines, pendant un minimum de 15 jours ou jusqu'à terme, supprime l'existence de prothrombine non carboxylée, c'est-à-dire inactive, dans le sang du cordon, jusqu'au 5e jour de vie et semble donc une mesure préventive efficace contre la maladie hémorragique du nouveau-né chez certaines femmes traitées par ces médicaments.

EN RÉSUMÉ
Supplémentation systématique au cours de la grossesse pour prévenir une carence :
une dose unique de 100.000 UI de vitamine D au début du septième mois ;
une alimentation riche en folates dans la période périconceptionnelle voire une supplémentation de folates 200 microg par jour ;
une alimentation comportant des sources essentielles en iode (lait, poisson, oeufs, utilisation d'un sel enrichi en iode).
Aucune supplémentation systématique en :
protéines
fer
calcium
fluor
magnésium
Situations particulières :
en cas d'antécédents d'anomalie de fermeture du tube neural, une supplémentation en folates de 4 à 5 mg/jour en période péri-conceptionnelle (1 mois avant le début de grossesse jusqu'à 2 mois de grossesse) ;
en cas d'anémie (numération globulaire réalisée au 3e mois de grossesse), une supplémentation par 30 à 60 mg de fer par jour jusqu'à la correction de l'anémie ;
en cas d'anémie par carence en folates, une supplémentation comportant 1 mg de folates par jour jusqu'à la correction de l'anémie ;
dans des situations à risque de carence en iode (régions traditionnelles françaises du goitre endémique et immigrés, surtout de la zone sub-saharienne – Mali), une supplémentation de 100 à 150 microg/jour d'iode ;
un traitement d'environ 10 mg par jour per os de vitamine K1 en cas d'utilisation de certains traitements anticonvulsivants et d'antituberculeux, au minimum dans les 15 jours précédant l'accouchement ;
une supplémentation en magnésium en cas de crampes.

SFM Samirays
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